Le cauchemar de tout acquéreur d’un immeuble à construire est le non-achèvement de l’immeuble par le promoteur et l’impossibilité de le forcer à s’exécuter de ses obligations lorsque le promoteur a été déclaré en faillite en cours de construction, cas qui se présente malheureusement trop souvent.
Le code civil (article 1601-5) exige que le promoteur d’un immeuble en état futur d’achèvement fournisse à l’acheteur soit une garantie bancaire d’achèvement de l’immeuble, soit une garantie de remboursement des versements effectués en cas de résolution du contrat à défaut d’achèvement.
Objectifs
Tandis que la garantie d’achèvement permet à l’acquéreur de faire terminer la construction sans le cas échéant devoir supporter lui-même un prix plus élevé auprès d’un autre constructeur, la garantie de remboursement, quant à elle, assure la restitution des versements effectués en cas de résolution du contrat à défaut d’achèvement.
Champ d’application
Le champ d’application de cette obligation de garantie est limité à la vente en l’état futur d’achèvement.
Elle n’est pas exigée lorsque la construction en question est réalisée par l’État, les communes, les établissements publics et les sociétés dans lesquelles ces collectivités publiques possèdent une participation majoritaire.
Elle n’est pas non plus requise pour la construction d’une maison à appartements multiples acquise par un propriétaire unique.
Par ailleurs elle ne s’applique pas dans le cas d’une vente en l’état futur d’achèvement d’un immeuble qui ne relève pas du « secteur protégé » visé par la législation spéciale de la vente d’immeubles à construire.
Pour qu’un immeuble à construire fasse partie du secteur protégé, il faut que trois conditions soient remplies : il doit s’agir d’un immeuble à usage d’habitation ou à usage professionnel et d’habitation (i), il faut que le vendeur se soit réservé les pouvoirs de maître de l’ouvrage (ii) et il faut que des versements ou dépôts doivent être effectués avant même l’achèvement de la construction (iii).
Caractère obligatoire
L’inobservation de l’obligation de mentionner cette garantie dans le contrat de vente en l’état futur d’achèvement ouvre droit à une action en nullité. Il s’agit en l’occurrence d’une nullité relative qui ne peut être invoquée que par l’acquéreur et ceci seulement avant l’achèvement des travaux.
La loi répute non écrite toute renonciation à la garantie d’achèvement.
La garantie d’achèvement ou de remboursement doit obligatoirement être donnée par un établissement bancaire ou d’épargne.
Choix entre garantie d’achèvement et garantie de remboursement
Le choix laquelle des deux garanties il veut prévoir dans le contrat appartient au seul vendeur. Le vendeur et le garant ont la faculté, au cours de l’exécution du contrat de vente, de substituer la garantie d’achèvement à la garantie de remboursement ou inversement, à la condition toutefois que cette faculté ait été prévue dans l’acte de vente ; par ailleurs, pour qu’elle puisse produire des effets, il faut que cette substitution soit notifiée à l’acquéreur.
Tant la garantie d’achèvement que la garantie de remboursement donnent à l’acquéreur un droit direct envers l’établissement bancaire ayant accordé la garantie. L’acquéreur n’a pas à s’adresser au préalable au vendeur, mais il doit évidemment prouver le défaut d’achèvement.
Substitution de plein droit de la garantie de remboursement à la garantie d’achèvement
La garantie de remboursement se substitue de plein droit à la garantie d’achèvement lorsqu’il est établi que la construction ne peut être réalisée. Cette non-réalisation doit être due à des raisons matérielles ou juridiques, ce qui exclut le cas de l’annulation du contrat par l’acheteur pour vice de forme intervenue postérieurement à la construction.
Etendue et limites de la garantie d’achèvement
La notion d’ « achèvement de l’immeuble » vise l’achèvement « complet », c’est-à-dire de « la totalité des ouvrages, installations, équipements et éléments de l’immeuble » .
Cet achèvement complet doit être un achèvement conforme aux prévisions contractuelles, qui ne se limite pas à l’achèvement défini à l’article 1601-6 du Code civil (exécution des ouvrages et installation des éléments d’équipement indispensables à l’utilisation de l’immeuble conformément à sa destination).
Dans un immeuble en copropriété, l’achèvement complet ne vise pas seulement les parties privatives, mais également les parties communes.
Si la garantie d’achèvement vise à terminer la construction de l’immeuble, elle ne porte cependant en principe ni sur le non-respect du délai de construction convenu, ni sur le défaut de conformité, ni sur les divers vices de construction, à moins toutefois que ceux-ci aient un caractère substantiel ou rendent l’immeuble ou les équipements impropres à leur utilisation.
Fin de la garantie
La garantie d’achèvement ou de remboursement prend fin avec le constat d’achèvement de l’immeuble.
En cas de désaccord des parties, l’achèvement des travaux d’aménagement est constaté par un expert désigné par le juge des référés, saisi à la requête d’une partie ou de l’établissement bancaire garant.
Le constat d’achèvement signé par l’acquéreur fait éteindre la garantie.
En cas de vente d’un immeuble à construire constituant une copropriété, il faut admettre que la banque reste tenue de la garantie d’achèvement des parties communes jusqu’à ce que tous les copropriétaires aient accepté la constatation de l’achèvement, même si certains d’entre eux ont déjà signé la constatation d’achèvement ; ces derniers ne pourront cependant plus se prévaloir de la garantie pour ce qui est de leurs parties privatives, contrairement à ceux des acquéreurs ayant refusé la constatation d’achèvement.
[1] Cour d’appel luxembourgeoise, 16 février 2000, arrêt civil, Pasicrisie luxembourgeoise, t. 31, p. 239
[2] Elter et Schockweiler, Copropriété et vente d’immeubles à construire, n° 253
Author
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Lex Thielen est un avocat luxembourgeois, admis au barreau en 1987. Diplômé de l'Université Paris I Panthéon-Sorbonne, il se spécialise en droit civil (immobilier, construction, copropriété), droit commercial et criminalité économique. Auteur de plusieurs ouvrages juridiques, il est également notaire, médiateur pénal, consul honoraire d'Estonie et membre fondateur de diverses associations. Polyglotte, il parle luxembourgeois, allemand, français, anglais, espagnol et a des connaissances en italien, portugais et russe.
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